10 novembre 2022
Fermes bas carbone : quelles pistes pour réduire les émissions du monde agricole ?
DD & RSE Faculté et Recherche
La Chaire Modèles Entrepreneuriaux en Agriculture (MEA) de l'EM Normandie, en partenariat avec Cerfrance et le Crédit Mutuel, a organisé à Yvetot le jeudi 13 novembre, la 1ère Convention d'affaires professionnelle “Fermes bas carbone” à destination des agriculteurs, professionnels de l'agriculture et entreprises ou collectivités engagées dans une démarche RSE avec le monde agricole. Plus de 100 participants – agriculteurs, start-ups, grands groupes, coopératives, institutionnels – y ont pris part.
Roland Condor, responsable de la chaire MEA, tire les grands enseignements de cette journée. Faire du monde agricole un secteur qui réduit les émissions de gaz à effet de serre plutôt qu'il n'en produit nécessiterait une meilleure visibilité sur les pratiques qui y ont cours. Ensuite, les agriculteurs les plus en avancés devraient faire l'objet d'un meilleur soutien via les aides publiques. Enfin, nombre d'agriculteurs, échaudés par leurs relations avec la grande distribution, craignent que les solutions apportées ne finissent par contraindre trop fortement leur modèle économique.
L'enjeu de la transition bas carbone
Pour Roland Condor, « l'agriculture est le deuxième secteur d'activité émetteur de gaz à effets de serre, mais aussi celui au plus important potentiel de stockage de carbone ». En d'autres termes, l'agriculture est souvent pointée comme le 1er pollueur, mais elle s'avère être la première solution.
Mais pour devenir une solution, plusieurs difficultés concrètes restent à résoudre :
1 - Un manque de visibilité
Plusieurs méthodes de stockage du carbone existent comme l’Agriculture de Conservation des Sols (ACS), la plantation de haies ou de vergers, ou encore l’agroforesterie. Mais un état des lieux exhaustif et détaillé des pratiques, ne serait-ce que sur une région comme la Normandie, est difficile à établir en raison du manque de transversalité entre les territoires et les acteurs. Une meilleure vision des pratiques permettrait de créer un effet d’entraînement complémentaire à celui initié par des collectifs d’agriculteurs locaux (notamment les Groupements d’Intérêt Economique et Environnemental). Le principal problème reste la nébuleuse des méthodes de labellisation des démarches bas carbone. Celle-ci sont nombreuses et n’ont pas forcément les mêmes critères d’appréciation du stockage de carbone dans les sols. Les agriculteurs sont un peu perdus au milieu de « cette forêt de labels ». Une clarification est nécessaire.
2 - Un plafond de verre
Les agriculteurs estiment que les démarches bas-carbone leur ont été bénéfiques sur le plan économique et agronomique : les sols sont de meilleure qualité et l’utilisation des tracteurs a été réduite, ce qui n’est pas négligeable dans un contexte d’augmentation des prix du carburant. Les agriculteurs sont enthousiasmés par la démarche bas carbone. Ils se réalisent à travers la mise en application de nouvelles méthodes de production décarbonées. Mais ceux qui ont déjà entrepris cette transition ne voient pas ce qu’ils pourraient faire de mieux aujourd’hui. Il y a un effet tunnel qui décourage les agriculteurs pionniers. Un manque de perspectives est perceptible.
3 - La captation de la valeur ajoutée
Ce découragement pourrait être réduit par la vente de crédits carbone. Or, de nombreux acteurs, notamment des agrégateurs tirent profit du marché du carbone, souvent au détriment des agriculteurs. Un rééquilibrage de la valeur captée est donc nécessaire. Les agriculteurs restent cependant modestes en termes de taille comparativement aux grands groupes acheteurs de crédits Carbone. Pour des raisons de coûts de transaction, un grand groupe préfère passer par un intermédiaire-grossiste. Des démarches collectives peuvent cependant être menées sans que ce soit préjudiciable à chaque entité individuelle. Des démarches très locales peuvent également être déployées comme celle de la plateforme d'échange de crédit carbone Carbolocal au Havre.
4 - Un problème de soutien des acteurs
Les pratiques décarbonées devraient davantage être soutenues sur un plan économique tandis qu’une meilleure reconnaissance du travail accompli permettrait d’encourager le mouvement de décarbonation et de faire émerger de nouvelles innovations que les agriculteurs pourraient mettre en application. Certaines incohérences de la réglementation devraient également être levées comme la non-reconnaissance de la plantation de miscanthus comme pratique décarbonée.
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